L'église Saint Martin du Vertou
L’église de Lavau est placée sous le vocable de Saint Martin de Vertou, abbé qui évangélisa à la fin du VIème siècle les populations du Sud de la Loire. Son nom latin Ecclesia Sancti Martini de Vallea probablement établit l’étymologie du nom de la commune : valle _laval ou leval _lavau. De sa construction, on sait peu de choses, sinon qu’elle fut édifiée à l’initiative de l’abbaye de Blanche-Couronne au XIIIème siècle. On trouve trace de son existence dans un écrit de 1287. C’est, avec celle de Bouée, la plus ancienne de la région. De cette époque, ne reste visible que l’entrée principale de style roman. L’ensemble de l’édifice a du être reconstruit aux XVème et XVIème siècles, comme le laisse penser le remplage [1] de type gothique flamboyant du fenestrage et l’encadrement de la petite porte au Sud de style renaissance.
Il a fait ensuite l’objet de nombreux remaniements, restauration et aménagements.
En février 1768, le général de la paroisse [2] délibère sur l’utilisation de sommes léguées par deux paroissiennes défuntes : Françoise Trouillard veuve Seignard qui faisait don de 100 livres pour la refonte d’une des cloches fêlée et Marthe Audren qui laissait 220 livres pour les réparations de l’église et de la chapelle Notre-Dame-de-Pitié [3]
Les héritiers ne s’y opposant pas, les fonds servent finalement à financer des travaux plus pressants : le remplacement de la grande porte (l’achat du bois coûte 60 livres) et de celle du côté.
Fin 1778, on confie à Charles Courtoix, menuisier au bourg le remplacement du lambris de la voûte pour 520 livres [4]. On apprécie la richesse et la diversité des objets culturels et vêtements sacerdotaux de l’époque dans l’impressionnant inventaire des ornements, linges et meubles dépendant de la fabrique du 29 décembre 1768 : un ciboire, un ostensoir et une custode, un encensoir, 37 chandeliers, trois crucifix, le tout en argent ou bois doré, 6 chapes et 14 chasubles étoles et manipules richement décorés, 5 aubes, 4 surplis, 62 nappes d’autel, 19 devants d’autel… L’année 1790 est riche en événements : en juin, un nouveau carrelage est placé et un droit de chaise de 2 sous par an est établi. En fin d’année, le conseil général de la municipalité constate que le battant d’une des cloches s’est détaché et est tombé sur la voûte et un an après, il obtient le remplacement d’une de ces cloches fendue par celle provenant du couvent des cordeliers à Savenay.
Durant la période révolutionnaire, la célébration du culte est interrompue pendant un certain temps et les églises sont abandonnées voire utilisées à d’autres fins. Lavau n’est pas épargné puisqu’on y a entreposé du fourrage ! …Comme l’évoque une lettre de début 1795 du recteur (curé) Pierre-Antoine Tallendeau et on constate en 1813 que, faute d’entretien de la toiture, il pleut dans le bâtiment ! Aussi, le 14 mai 1817 Pierre Picaud, maire et Jean-Baptiste Peneau, curé, acceptent le devis des travaux présenté par Joseph Priou charpentier au bourg de Lavau, Robert Paressant couvreur à Campbon et Jean Desmas maçon à Campbon, qui s’élèvent à 560 francs et sont financés par la vente de 20 hectares de communs et landes. Le même couvreur intervient de nouveau en mai 1824 et remplace 2000 ardoises pour 127,50 francs (350 €). L’ornementation et l’aménagement cause aussi des soucis car en novembre 1826, la commune décide de faire installer un confessionnal par Jean Robin, menuisier à Savenay, d’acheter quelques ornements et surtout de faire fabriquer le retable du maître-autel et restaurer les retables latéraux pour décorer le chœur. La dépense de 2 687 francs (7 300 €) est prélevée sur le produit de la vente de biens. En 1828, une chaire à prêcher est installée pour 478 francs (1 300 €) et un chemin de croix est mis en place en 1846. La couverture et le lambris de la voûte sont entièrement remplacés en 1881 pour 2 784 francs et les sols du choeur et de la nef en 1889.
En juin 1913, le conseil municipal observe que des éléments du gros œuvre et le crépissage (corniches, contreforts et croisées) menacent ruine et engage leur réfection pour 2 543 francs (7 100 €) et sollicite un secours du département d’un tiers de la dépense. Cependant, les travaux sont d’une telle urgence, les élus décident peu après de ne pas attendre l’obtention de la subvention et y renoncent mais l’évêché s’y substitue en apportant une aide de 850 francs (2 400 €). Le concile de Vatican II au début des années introduit des nouveautés dans le rite liturgique et la paroisse fait transformer le chœur en 1965 : la table de communion et les stalles sont enlevées, le chœur redessiné et revêtu de marbre, et les retables repeints.
La commune fait procéder à la réfection totale de la voûte en 1971 et de la couverture et des enduits extérieurs en 1987. Dans la nuit du 3 au 4 août 1994, un incendie provoqué par la foudre détruit l’église Saint Martin. Les dégâts sont énormes. Cet événement est douloureusement ressenti par la population traumatisée par la quasi-destruction de ce chef d’œuvre de son patrimoine, classé d’ailleurs à l’inventaire supplémentaire des monuments historiques. Il avait traversé les vicissitudes de huit siècles, chaque époque ayant laissé son emprunte et cette richesse du patrimoine religieux et commun des lavausiens était presque réduite en cendres !
Mais d’importants travaux de restauration sont immédiatement entrepris et lui donnent l’aspect qu’on lui connaît aujourd’hui. Une porte est découverte sur le côté nord - elle avait du être bouchée lors de l’édification des fonds baptismaux en 1905 – les retables latéraux sont repeints dans des coloris typiquement baroque, le chœur est rétabli dans sa forme galbé d’autrefois et remeublé d’un maître autel s’intégrant parfaitement dans l’ensemble et surtout on restitue la splendide verrière du choeur, comblée début XIXème, dans son origine gothique. Le coût total de la restauration s’est élevé à 7 766 000 francs intégralement couvert par l’assurance de la commune et les subventions.
[1] Réseau de pierres décoratif qui permet de maintenir les vitraux en place.
[2] Nom porté à l’époque par l’équivalent du conseil paroissial qui, sous l’ancien régime, administrait la paroisse, la commune n’existant pas encore. Cet organe de décision était composé de 12 marguillers choisis en nombre égal dans les deux frairies de Lavau (la Lambretière à l’ouest et la Villaupuy à l’est), du sénéchal et du procureur fiscal de la seigneurie de la Haye et du recteur.
[3] Chapelle située à l’ouest du bourg près du champ de foire (place de l’actuelle rue des carrières) détruite en 1802.
[4] On peut difficilement convertir la livre en euro. On ne peut qu’utiliser la notion de pouvoir d’achat que représente ces sommes : une journée de travail d’un personnel peu qualifié était rémunérée 0,30 livre, ce qui permettait d’acheter 1,5 kg de pain